Comment l’IA AMIGO améliore les images du télescope spatial James Webb
Depuis son lancement en 2021, le télescope spatial James Webb (coût estimé a 10 milliards de dollars) a transformé l’astronomie moderne. Mais les premières observations ont révélé un défaut important: certaines images apparaissaient floues. Pour y remédier sans intervention humaine sur l’appareil, deux chercheurs australiens ont développé un programme d’intelligence artificielle nommé AMIGO (Aperture Masking Interferometry Generative Observations).
Un problème optique et électronique
Situé a environ un million de miles de la Terre, Webb ne peut pas beneficier d’une reparation en personne, contrairement a Hubble qui avait necessite une mission de la navette spatiale en 1990 pour corriger un probleme d’optique. Le télescope utilise de grands miroirs segmentes – le plus grand pèse plus de 1 500 pounds et mesure 21 feet de diamètre – pour refleter la lumiere infrarouge vers ses detecteurs.
Le flou observé provenait principalement d’un effet electronique courant sur les caméras infrarouges: des charges electriques partagent leur signal avec les pixels voisins, faisant fuir la lumiere des pixels les plus brillants vers les plus sombres. Selon les chercheurs, cet effet etait dix fois plus important que prevu, rendant difficile la detection d’objets peu brillants près d’etoiles lumineuses.
Comment AMIGO corrige les images
Plutot que d’essayer de modifier l’instrumentation physique, les chercheurs ont entraine AMIGO a reproduire le comportement optique et electronique du télescope. Le logiciel restaure en particulier les performances de l’AMI (aperture masking interferometer), une fine plaque metallique percee de trous qui permet de mesurer d’eventuelles desalignements optiques a partir de la lumiere filtree.
En apprenant a identifier et a corriger les cas ou des charges electriques contaminent les pixels voisins, AMIGO parvient a compenser numeriquement les distorsions electroniques et a amener l’AMI a des niveaux de performance inedits. Comme l’a resume un des chercheurs: « plutot que d’envoyer des astronautes pour boulonner de nouvelles pieces, ils ont reussi a reparer par du code. »
Premiers resultats scientifiques
Les equipes de l’University of Sydney ont publie deux articles demonstrant les capacites gagnees par Webb grâce a AMIGO:
- Dans la premiere etude dirigee par l’etudiant en doctorat Louis Desdoigts, AMIGO a corrige les distorsions electroniques lors de l’observation d’un systeme stellaire. Webb a pu ainsi imager un exoplanete et une naine brune situes a environ 133 light-years, objects auparavant noyés dans la lumiere de l’etoile voisine HD 206893.
- Dans une seconde etude, l’equipe a repousse les limites de resolution en revisitant des cibles difficiles: voiles de poussiere autour d’etoiles, jets emises par des trous noirs, et images plus nettes des volcans actifs de la lune Io autour de Jupiter.
Selon les chercheurs, AMIGO a permis d’isoler des objets plus faibles et d’obtenir des images plus nettes, ouvrant la porte a de nouvelles detections et analyses a hautes resolutions.
Perspectives
Bien que le systeme soit encore en developpement, les auteurs estiment qu’AMIGO pourrait ouvrir une nouvelle phase pour Webb et pour son successeur, le Nancy Grace Roman Space Telescope, prevu pour un lancement en mai 2027. L’observatoire Roman offrira un champ de vue environ 100 fois plus grand que celui de Hubble, donnant acces a environ un milliard de galaxies pour etudier la matiere noire, l’energie noire et des exoplanetes lointaines.
Ces ambitions restent cependant soumises aux choix budgets: le deploiement futur pourrait etre affecte si des coupes budgétaires importantes venent compromettre les projets.




